Séparation homme-machine

Séparation homme-machine

Que signifie la « séparation du travail des hommes et des machines » ? Quel intérêt ?

OK, la phrase paraît absconse, mais il n’en reste pas moins que « séparer le travail des hommes de celui des machines » est un des aspects essentiels du principe de « jidoka », et une source importante de productivité et de qualité. La plupart des gens sont familiers de la dimension « juste-à-temps » du Lean, mais le « jidoka » constitue la partie immergée de l’iceberg – là où réside le potentiel véritable.

Il est rare que l’on pratique le « Stoppez et révélez les anomalies », mais le principe est de plus en plus connu à mesure que les gens en perçoivent le sens. On sent bien intuitivement qu’il vaut mieux pratiquer ainsi plutôt que de fabriquer des pièces mauvaises et les mettre de côté pour pouvoir continuer à travailler comme si de rien n’était. De la même manière, il n’est pas aisé d’implémenter le « détrompage » qui s’appuie sur divers dispositifs pour révéler en temps réel le travail KO, mais c’est facile à comprendre.

« Séparer le travail des hommes de celui des machines » est un concept moins familier, mais constitue une énorme source de qualité, productivité, et réduction de coûts. L’autre jour, j’étais sur le Gemba, en train d’observer des opérateurs qui assemblaient des équipements pour l’usine. Une part de leur travail consistait à couper des tubes d’acier. L’opérateur utilise une machine très simple pour découper l’acier : il positionne le tube, fait descendre la scie, la stoppe quand le tube est coupé, et récupère ses pièces. Il fait partie du process – il ne peut pas faire autre chose en même temps, donc il est lié à la machine. Le résultat est qu’il vous faut à la fois un homme et une machine pour faire le boulot.

Séparer le travail des hommes de celui de la machine impliquerait qu’il faudrait trouver comment (1) placer la pièce sur la machine, (2) toucher un bouton « action », (3) se retirer et laisser la machine travailler, et (4) revenir plus tard et récupérer le résultat au bon moment. Cela induit deux astuces d’ingénierie, comme indiqué ci-dessous dans de vieux documents Toyota :

  • Alimentation automatique : une fois la pièce en place, la machine la prélève automatiquement
  • Ejection automatique : quand la machine a terminé, elle éjecte la pièce pour qu’elle soit facile à récupérer

En d’autres termes, imaginez que vous prépariez un repas sur un fourneau – vous avez plusieurs poêles au feu, que vous devez surveiller en permanence pour réussir votre plat. D’un autre côté, si vous placez votre repas dans le four à micro-ondes, vous appuyez le bouton et faites autre chose – vos mails ou la vaisselle. Quand le micro-ondes a terminé, il vous avertit, et vous pouvez venir récupérer votre plat quand vous en avez besoin. Bon, OK, ça vous retire le plaisir de la cuisine, et un repas bien mitonné est meilleur, mais c’est juste une question d’amélioration de la technique. Il n’en reste pas moins que le four micro-ondes vous a libéré de la nécessité de le surveiller sur la durée du process, ce qui vous a permis de faire autre-chose.

Remplacez « Machine » par « Système »

De nos jours, bien des métiers sont dans le domaine des services, et vous pouvez vous demander en quoi cela vous concerne. Quelle est la probabilité que vous ayez à presser deux boutons sur une machine pour la regarder travailler ? Elle peut être élevée, en fait, si vous remplacez le mot « Machine » par « Système ». Réfléchissez à toutes les fois où vous avez dû pister une requête à travers un système, juste parce que vous savez que si vous ne le faites pas, vous n’aurez jamais de réponse.

En logistique, séparer le travail de l’homme de celui du système signifie que vous avez exactement les bonnes pièces et les bonnes informations au moment où vous en avez besoin, de la manière et dans la quantité dont vous en avez besoin, sans avoir à effectuer un quelconque travail pour extraire du système l’information ou la pièce dont vous avez besoin. Le travail administratif est encore pire : quand était la dernière fois où vous avez vu un administratif travailler pour vous au lieu de vous demander de travailler pour lui ?

Nombreux sont les étudiants qui ont le sentiment qu’ils ont assez à faire à tenter de comprendre le flux, et qu’ils s’intéresseront à des concepts plus « avancés » comme le jidoka plus tard dans leur périple Lean – ceux-là ont loupé un truc. Le Lean est un système, ce qui signifie que vous ne pouvez progresser dans une dimension si vous ne prenez pas les autres en compte. Par exemple, créer un flux continu est un des buts principaux du Lean, car il permet d’améliorer à la fois la qualité et la productivité, tout en réduisant les lead-times. Le flux continu est souvent difficile car il existe des « monuments » dans les processus, des machines ou des systèmes qui sont centralisés, avec pour effet du travail par lots.

Ces « monuments » ont souvent besoin de beaucoup d’attentions, avec des gens qui y sont dédiés, juste pour les garder en fonctionnement. Afin de progresser vers la mise en place d’un flux continu, il est nécessaire de :

  • Séparer les homes des machines en rendant les machines plus autonomes
  • Réduire et simplifier les processus pour qu’ils puissent s’intégrer dans un flux continu

D’une certaine manière, c’est toute l’histoire des ordinateurs – depuis les gros ordinateurs des années 60, vers les PC de bureau, puis les portables, pour enfin terminer aux smartphones actuels. Rien de tout cela n’est possible sans rendre le processus bien, bien plus simple à faire fonctionner

Quelques conseils pour bien démarrer

Par où commencer ? Eh bien, il ne vous viendrait pas à l’idée de regarder travailler votre lave- vaisselle, si ? Les bonnes opportunités de Kaizen sont :

  • Voyez-vous quelqu’un surveiller un processus pour le cas où des pièces produites seraient mauvaises?
  • Après avoir appuyé sur le bouton « marche », devez-vous rester devant la machine pour vous assurer qu’elle a effectivement bien démarré ?
  • Est-il nécessaire de maintenir la pièce en place dans la machine, ou bien d’ajuster son positionnement pour que le travail puisse être bien réalisé ?
  • La machine éjecte-t-elle automatiquement la pièce pour qu’il soit facile de la prélever et de l’utiliser à l’étape suivante ? (pensez aux distributeurs automatiques de boissons, pour lesquels le bac dans lequel la boisson est livrée est protégé par un volet avec lequel il faut se battre pendant 10 minutes pour accéder à votre produit)

Pratiquez systématiquement la séparation du travail de l’homme de celui de la machine (ou du système), et vous verrez évoluer la manière dont vous appréhendez les problèmes techniques. Cela changera également votre perception sur la manière dont les machines doivent être conçues – et sur la notion d’efficacité des processus d’efficacité des processus. Le but ultime du Jidoka est de garantir une transformation continue du contenu, et la réalisation pleine et entière du flux

Téléchargez la version PDF ici.  Traduit de l’américain par François Lopez

 

 

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