Voyez-vous votre entreprise comme une mécanique ou un arbre ?

Voyez-vous votre entreprise comme une mécanique ou un arbre ?

“Il faut faire plus avec moins,” Les directions n’ont que ça en tête. Leur méthode est simple : commander à un cabinet de conseil la réorganisation qui va bien, réunir l’encadrement pour expliquer comment on va s’y prendre, et puis y’a plus qu’à… faire appliquer les nouvelles consignes dans toute la boutique.

Méthode simple, certes, mais tout aussi idiote : si ça marchait, depuis le temps qu’on essaye, ça se saurait !

Bien sûr qu’il faut être plus productif. Mais comment ? Tout d’abord, il faut convaincre plus de clients de nous faire confiance. Après il faut gaspiller moins d’heures productives en corrections d’erreurs, retours en arrières, défaut à la benne, etc. Ensuite il faut mieux se servir des capacités en place et finalement, éviter d’investir dans des structures qui portent des grands projets de « changement » qui n’aboutissent jamais.

La clé de la productivité ne se trouve pas dans la pression managériale et la discipline de l’exécution, mais dans le soin apporté au travail par chacun, dans l’astuce de résolution des problèmes qui surgissent au quotidien et dans la collaboration entre collègues et services – pas de grande surprise !

En se servant des possibilités du Big Data pour mesurer les interactions dans des firmes, le chercheur Alex Pentland a montré qu’une simple accélération du flux des idées augmente considérablement la productivité de chaque groupe – et ceci sans même regarder le contenu qualitatif des idées. Comment, donc, accélérer le flux des idées et la qualité des idées émises ?

Les métaphores mécaniques avec lesquelles nous avons grandi ne nous aident guère à ce sujet : l’entreprise comme une suite de rouages bien huilés, comme un organigramme où les décisions prises au sommet sont exécutées impeccablement par la base, comme une organisation militaire au service de la stratégie visionnaire (les réelles organisations militaires modernes sont tout sauf ça).

Le Lean nous propose une métaphore complètement différente : une métaphore organique.

Si l’entreprise est vue comme un arbre, les feuilles en sont les activités, les fruits les profits, les branches les modes de travail, et les racines la connaissance qui sous-tend ces modes de travail.

Les outils du Lean fonctionnent à ces différents niveaux :

  • L’analyse de la valeur et l’ingénierie de la valeur pour développer plus d’activités à valeur ajoutée pour les clients avec moins de gaspillages
  • Le Juste-à-temps et le Jidoka (flux continu/stop/flux continu/stop) pour renforcer les branches en améliorant continuellement les modes de travail collectifs et en éliminant les branches mortes (activités à non-valeur ajoutée)
  • Le kaizen pour développer les racines en permettant aux équipes de s’approprier leurs modes de fonctionnement et d’approfondir leurs connaissances et la résolution de problème, pour encourager chaque personne à mieux connaître ses standards et comprendre comment les interpréter dans une multiplicité de situations.

Ces trois niveaux d’activité ont deux buts explicites :

  1. Accélérer le flux d’idées collaboratives dans l’entreprise
  2. Approfondir la connaissance théorique et pratique de chacun

Ceci n’est que pur pragmatisme. Imaginez une équipage de régate qui se prépare pour une course importante. Très naturellement, l’équipage s’entrainera en :

  • Faisant des parcours pour comprendre et résoudre les problèmes qui peuvent survenir en navigation
  • Pratiquant des manœuvres pour s’approprier gestes techniques et collaboration sur des gestes nécessitant une coordination fine
  • Topos théoriques pour approfondir la compréhension qu’ont chacun des équipiers de leur sport.

Portées par la recherche de résultats à court-terme et les divisions bureaucratiques (qui font que les conséquences de décisions managériales sont souvent subies par d’autres que ceux qui les prennent), les entreprises tentent toujours de faire de la fausse productivité en augmentant l’activité (les feuilles) ou arrachant du profit (les fruits) sans jamais développer les racines. Cela les rend juste plus fragiles (d’ailleurs, l’espérance de vie des grandes entreprises a été divisée par 3 depuis les années 60).

Le Lean management est une pratique d’activités quotidiennes qui vise à obtenir de meilleurs résultats en développant les racines de l’arbre autant que ses branches ou ses feuilles. Ce faisant, cela permet de donner du sens à tous les postes de l’entreprise et d’engager les collaborateurs dans leurs métiers ainsi que les impliquer plus dans le succès de leurs équipes.

Michael Ballé

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2 Commentaires

  • Mielcarek Didier

    image intéressante
    et pourquoi pas la variante suivante :
    où les racines seraient les fondamentaux de l’entreprise (en Lean ce serait le kaizen, les standards, le tutorat…) là où on formalise les connaissances, et la sève serait les connaissances générées par ces fondamentaux.
    Tout l’enjeu consiste alors à diffuser ces connaissances partout dans l’arbre, dans toutes les activités…

  • Michel COURTAY

    “Il faut faire plus avec moins,” Les directions n’ont que ça en tête. Leur méthode est simple : commander à un cabinet de conseil la réorganisation qui va bien, réunir l’encadrement pour expliquer comment on va s’y prendre, et puis y’a plus qu’à… faire appliquer les nouvelles consignes dans toute la boutique.
    Ce qui est amusant, c’est que c’est quand même un peu ce que vous faites. La diffusion du Lean dans les entreprises est essentiellement faite, ou pilotée, ou assistée, par des cabinets conseil ou par des responsables formés par des centres de formation.
    De même, les outils utilisés sont ceux qui depuis des décennies sont les prétextes à mettre les équipes en mouvement. La chasse au Gaspi a quand même été très forte après le premier choc pétrolier,… dans le millénaire précédent (70’s).
    En fait, arbre, Kaizen, VSM,… ne sont “que” les armes d’une communication pour aider les acteurs de l’entreprise à comprendre que prendre en main sa contribution à la satisfaction client est la seule solution pour pérenniser son activité en maîtrisant sa création de valeur ajoutée, et pas seulement en production, ce qui permet de “faire toujours mieux pour faire longtemps”.
    Cela étant, j’aime bien l’image de l’arbre.
    Bien cordialement

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