Pourquoi les services informatiques échouent dans nos grandes organisations et pourquoi le Lean management est la seule solution

Pour sa première journée au siège d’une banque de détail à Paris, François arrive plein d’énergie et d’entrain. Il rencontre son nouveau manager Antoine qui se réjouit de son arrivée et le conduit à son bureau. En chemin, il le présente à d’autres membres de l’équipe puis arrivés devant un bureau vide, dépourvu d’ordinateur et de téléphone, Antoine s’exclame : « Oh non ! Le service informatique n’a pas dû voir ma note annonçant ton arrivée pour aujourd’hui. Je les appelle et tout sera prêt très vite ». François s’installe alors à son nouveau bureau vide et attend patiemment. Deux heures plus tard, Antoine revient pour l’informer que le service informatique a rappelé et que tout sera prêt le lendemain.

En réalité, l’ordinateur mettra deux semaines à arriver, à être connecté à une imprimante et aux serveurs de l’entreprise. Pendant ces deux semaines, François sollicite ses collègues en permanence pour obtenir des informations et ne peut quasiment pas travailler. Son enthousiasme du début s’estompe rapidement, laissant la place à de la frustration et du stress.

Pourquoi diable aura-t-il fallu deux semaines pour installer un PC et paramétrer une adresse email, alors que cela ne demande qu’une heure de travail au service informatique ?

Malheureusement, ce genre d’exemple n’est pas rare, et c’est pour cela que l’informatique doit absolument changer. On a l’habitude de critiquer la bureaucratie et la piètre qualité de service qui gâchent la fonction IT, et notre impression négative est encore renforcée par la différence entre notre perception des technologies à titre personnel et les environnements informatiques du monde du travail. Il est tellement simple d’installer une application sur un smartphone, d’acheter un produit sur Amazon ou de trouver de la musique sur Spotify, pourquoi n’arrive-t-on pas à faire fonctionner les services informatiques dans nos organisations ?

Ces dernières années, le mouvement Lean a commencé à explorer la façon dont l’informatique pourrait fournir un meilleur service à ses clients, fluidifier ses processus et réellement simplifier la vie des gens dans les organisations.

Si l’informatique a commencé à s’ouvrir à l’idée que le Lean pouvait l’aider, c’est pour trois raisons :

  • La première c’est que l’on attend de l’informatique qu’elle fournisse des services de meilleure qualité et plus rapidement à ses utilisateurs. Les critiques permanentes encouragent les responsables informatiques à revoir leurs processus, à chercher à comprendre d’où viennent les problèmes, quelle est la valeur de ce qu’ils fournissent et donc à se convertir au PDCA. Ce qui les conduit à faire des essais, à appliquer des petits changements itératifs aux processus, plutôt que d’essayer de transformer la fonction IT dans son ensemble, ce qui coûte affreusement cher et qui est très difficile à réussir.
  • Deuxièmement, les DSI montrent un intérêt croissant pour les améliorations qu’apporte la démarche Lean et qui sont visibles en divers endroits de leur organisation. Ils deviennent ainsi plus enclins à participer à la transformation de l’activité (et peut-être même à faciliter cette transformation).
  • Enfin, la transformation numérique est en vogue et le besoin impérieux de lancer sur le marché des produits – comme des applications mobiles – attire l’attention des décideurs sur la nécessité de réduire drastiquement les délais de livraison.

Il est difficile mais aussi passionnant d’être DSI ces temps-ci ! Confrontés à un grand nombre de challenges, les décideurs informatiques commencent à voir dans le Lean une façon de structurer une fonction habituellement complexe et désorganisée.

Quels problèmes l’informatique doit-elle résoudre ?

Les principaux problèmes de l’IT tiennent au manque de collaboration et à un flux d’information défaillant. En effet, il est souvent difficile de savoir qui fait quoi (sans cela, pourquoi 7 personnes devraient-elles impliquées dans la simple tâche qui consiste à installer un PC ?) et quelles sont les exigences des utilisateurs.

Il n’est pas rare que le service informatique livre un produit de mauvaise qualité qui demande beaucoup de retouches et génère d’importants retards. S’ajoutent à cela, le fait que trop de gens sont impliqués dans le processus et que l’information est mal partagée, ce qui conduit à une situation où personne ne comprend pourquoi un problème survient.

Le Lean management est ici d’une grande aide : en identifiant la valeur pour le client, en trouvant la cause racine des problèmes et en mettant les problèmes sur la table, le Lean facilite la vie de tout le monde dans l’entreprise. La démarche soutient les utilisateurs internes, et favorise des relations positives entre l’informatique et ses utilisateurs (basées sur la collaboration et la communication). Résultat : la productivité s’améliore et le lieu de travail n’est plus un environnement chargé de stress.

L’autre problème des DSI c’est la fiabilité : tout le monde fait des recherches sur Google tous les jours et jamais Google ne tombe en panne ! D’ailleurs, si cela devait arriver, nous serions complètement perdus. Or, dans nos entreprises, comme les services informatiques sont loin d’être fiables, nous nous sommes habitués à ne pas avoir les mêmes exigences vis-à-vis d’eux que vis à vis de Google.

Il y a là un nouveau challenge à relever pour l’informatique, et là encore, le Lean peut aider. Les concepts de « jidoka » et de qualité intégrée nous obligent à considérer chaque problème comme une occasion de se remettre en question et d’imaginer de nouvelles façons de faire. Cette façon d’approcher le travail pas à pas limite l’instabilité du système.

Il y a plus encore : si l’informatique veut vraiment changer, elle doit apprendre à livrer à l’heure. Voici un exemple : j’ai travaillé dans une entreprise qui a dépensé beaucoup de temps et de ressources pour développer une technologie innovante qui devait permettre à ses commerciaux de présenter leur catalogue de produits sur tablette à leurs prospects. Il y a quelques semaines, 3 000 commerciaux étaient réunis à Paris pour assister à la présentation de cette nouvelle technologie mobile. Ce qu’ils ne savaient pas c’est que 6 semaines plus tôt, le service informatique avait commencé à dire que le logiciel ne serait pas prêt à temps pour le lancement. Comment a-t-on évité le fiasco ? Le management a mis une pression énorme sur le service informatique pour qu’il livre à temps…

Mais on ne devrait pas en arriver là ! Dans de nombreuses organisations, on a fait le pari de faire collaborer plus efficacement les équipes et elles réussissent à livrer les projets à l’heure grâce à l’utilisation de l’obeya. Des exemples de mises en œuvre de l’obeya ont été présentés au Lean IT Summit par Malika Mir de IPSEN et de Nicolas Volck de AG2R LA MONDIALE par exemple.

Nous devons trouver de nouvelles manières de manager l’informatique. Aujourd’hui, les organisations informatiques ont tendance à s’organiser de façon à laisser très peu de marge de manœuvre et très peu de responsabilités aux professionnels très compétents qu’elles emploient. Non seulement ce système ne fonctionne pas, mais il tue littéralement l’initiative et la créativité au lieu de donner de l’autonomie aux employés et de construire la confiance entre les décideurs et le reste de l’organisation.

Le Lean management apporte une véritable alternative à l’informatique qui se caractérise par la vitesse, la gestion de la qualité, et l’engagement des personnes. Soyons clairs : c’est la seule solution qui nous permettra de ne plus avoir à attendre 9 mois pour qu’un simple bouton sur un site web soit modifié ou deux semaines pour que le compte email un nouvel employé soit créé.

Marie-Pia Ignace, Présidente de l’Institut Lean France

 

 

 

 

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